Nous vous présentons la librairie Philippica, spécialisée depuis 2000 dans la vente et l’achat d’ouvrages autour du cheval, uniquement par correspondance. Elle propose une sélection de livres sur l’équitation, la médecine vétérinaire, l’attelage, le dressage et la représentation de l’animal dans l’art. Dans cet entretien, Philippe Deblaise évoque son parcours dans le métier.
AUTOUR DU CHEVAL
Je viens d’une famille de viticulteurs et d’éleveurs de chevaux en Charente-Maritime. Depuis toujours, je suis passionné de lecture, c’est pourquoi j’ai voulu faire des études littéraires. Puis, vers l’an 2000, j’ai monté un élevage de pur-sang arabes et c’est à ce moment-là que je me suis intéressé à la littérature équestre. En constatant qu’il existait peu de libraires spécialisés dans le domaine, j’ai choisi de créer ma propre librairie autour du cheval.
A l’époque, j’étais en contact avec deux libraires parisiens. Tout d’abord Pierre Besnault, un libraire d’anciens installé rue Charlemagne, dans le Marais. C’était un vétérinaire en retraite qui avait un stock consacré aux livres équestres. C’est par lui que l’idée m’est venue de me spécialiser dans le domaine. J’étais aussi lié à Jean-Louis Bonvallet, qui avait la librairie Elbé sur le boulevard Saint-Germain, où l’on trouvait un important rayon sur l’équitation. Lui aussi était cavalier, il avait même suivi des cours avec Nuno Oliveira au Portugal.
J’ai donc ouvert ma librairie en 2000. Je n’ai pas eu de formation à proprement dit. Cela s’est fait assez facilement. Depuis 22 ans, je travaille uniquement par correspondance. J’ai un bureau situé dans la ville de Saintes, où je reçois sur rendez-vous.
UNE SPECIALITE UNIQUE
J’ai commencé par racheter des stocks de littérature équestre chez plusieurs confrères, dont ceux de Jacqueline Franchon à la librairie de Montbel. Ayant une quarantaine de chevaux en permanence à l’élevage, je maîtrise parfaitement le sujet. J’ai ainsi acquis peu à peu une crédibilité vis-à-vis des vétérinaires, écuyers et amateurs.
Puis en 2004, j’ai écrit Gaspard des chevaux, un livre retraçant la vie de l’écuyer Gaspard de Saunier, à qui l’on doit trois ouvrages sur l’équitation au XVIIIe siècle. Cette publication a remporté un grand succès et a reçu le prix Pégase remis par Le Cadre noir de Saumur. Cela m’a considérablement aidé à me forger une réputation dans le milieu. Et j’ai continué avec quatorze autres ouvrages, le dernier en date étant consacré à Nicolas Jenson, le premier fondeur de caractères, imprimeur et libraire français.
En plus de cela, la thématique du « cheval » me semble sous-estimée, alors qu’elle est pourtant d’une richesse considérable. On peut autant s’intéresser à l’équitation, à la médecine vétérinaire, à l’attelage, au dressage, mais aussi à la représentation de l’animal dans l’art. Il est vrai qu’un grand nombre d’œuvres sont composées d’une scène avec un cheval, comme on en voit chez Vernet, Delacroix, Géricault ou Alfred de Dreux. Il y a donc beaucoup de choses à en dire. Pourtant, je suis aujourd’hui le seul à être spécialisé dans ce domaine.
DES OUVRAGES DU MONDE ENTIER
Je recherche des ouvrages dans le monde entier. Récemment, j’ai fait l’acquisition du premier catalogue d’éperonnerie au monde, constitué par Kreutzberger et datant de 1591. C’est un livre de gravures sur bois qui représentent des mors tels qu’on les fabriquait en bavière au XVIe siècle. C’est un ouvrage qui comporte 409 planches gravées, ce qui est conséquent. En plus de cela, ces mors sont classés par rapport à leur adaptabilité aux six races de chevaux qu’on connaît à l’époque. Le cheval espagnol, le cheval turc, le cheval des Flandres… tous sont décrits et illustrés sur une planche. Dans l’histoire du livre, c’est d’ailleurs la première représentation de chevaux classés par race. Cet ouvrage a fait l’objet de deux éditions au XVIe siècle : une en 1562 et celle-ci en 1591. C’est un très beau livre.
J’ai aussi acquis Le Cavalerice françois, le premier livre d’équitation français de Salomon de La Broue, un écuyer français XVIe siècle. Cette édition date de 1620 et se divise en trois sections. C’est un ouvrage technique sur l’équitation, qui explique les préceptes principaux pour bien dresser les chevaux aux exercices de la carrière et de la campagne.
DIVERSIFIER LE METIER
Aujourd’hui, je cherche de plus en plus à vendre des livres excessivement rares. C’est plus excitant et valorisant, c’est un plaisir particulier. Mon souhait le plus cher, c’est surtout de ne jamais cesser de trouver de beaux ouvrages. Il y a quelques années, j’ai formé la plus grande bibliothèque équestre avec la splendide collection de Johan Dejager, un industriel flamand. Avec mon aide, il a d’ailleurs publié Great Books on Horsemanship, un ouvrage de référence encyclopédique qui rassemble la quasi-totalité des grands livres sur le cheval. C’est un travail passionnant que j’espère pouvoir poursuivre.
Néanmoins, parmi les milliers de livres que j’ai en stock, je pense qu’on pourrait constituer un fond d’ouvrages à prix modique qui serait mis en valeur sur internet. Je songe à employer une personne afin de donner une nouvelle dynamique à mon activité sur les réseaux sociaux et sur les sites de vente comme Abebooks. Je pense qu’il y a une carte à jouer à ce niveau. Cela me semble important de mettre en lumière mon activité de façon plus actuelle que je le fais.  

Entretien mené par Romane Fraysse
Photographies de Camille Pradel de Lamaze

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